A l’occasion de ce « j’irai débattre près de chez vous », nous avons eu le plaisir d’être remarquablement bien accueilli au centre social du Paris des Faubourg, dans le 10e. Dans une vaste salle aux chaudes couleurs pimpantes nous avons pu installer les chaises face à un écran de projection, quelques victuailles et un peu de jus de pomme.
Le public était au rendez-vous, à l’image du 10e, des profils variés d’horizon très divers. Les élèves d’ateliers d’apprentissage de la langue française ont courageusement relevé le défi du débat, avec un grand succès.
Un attachement profond à la diversité de celles et ceux qui font la villeÂ
La réunion a mis en évidence l'attachement des résidents à la diversité culturelle et sociale du 10e arrondissement de Paris. Des participants de divers horizons ont partagé leur expérience, montrant comment la ville embrasse et soutient les différentes communautés. Paris (et le Xe plus particulièrement) apparaît avant tout comme une grande ville mixte et cosmopolite ouverte sur le monde. Dans les appréciations positives sur la ville ressort la grande richesse des possibles qu’elle offre, le fait qu’il s’y passe toujours quelque chose et la diversité de son offre culturelle.Â
Paris a été décrite comme un espace de liberté, surtout pour ceux qui cherchent à s'émanciper des normes restrictives de leurs milieux d'origine. Un participant a trouvé dans l'anonymat de la ville un refuge pour vivre ouvertement son identité gay. Ce sentiment d’un anonymat libérateur de la grande ville est partagé par des nombreux participants qui ont grandi dans des petites villes ou en territoire rural.Â
Néanmoins, l'accueil des personnes étrangères ne se fait pas toujours dans les meilleures conditions. Des nouveaux arrivants ont trouvé du travail grâce à des réseaux familiaux, mais des complications administratives entravent l'accès à l'emploi et au logement. Au bout de 5 ans de démarches, une participante n’a pas encore pas encore obtenu son titre de séjour alors que ses enfants sont français.Â
La forte pression touristique et commerciale à Paris assèche parfois cette mixité soit par l’ouverture de commerces touristiques haut de gamme à la place de commerces alimentaires, soit par la standardisation des commerces d’une rue qui tend parfois à la mono-activité. La mairie pourrait intervenir davantage pour préserver la mixité commerciale.Â
Une ville parfois difficile à vivre
L’ambiance du quartier fait l’objet d’avis contrastés. Certains apprécient l'esprit de village du quartier, les interactions chaleureuses avec les commerçants et les voisins enrichissant son quotidien, malgré quelques incivilités. D’autres participants ont exprimé leur perception d'une ville parfois dure à l’ambiance pesante : « Les gens sont souvent agressifs et l'attitude des gens à changé ». Il semble plus difficile qu’avant d’aller vers les autres et qu’ils viennent vers nous : « Les gens sont dans leur coin Plus difficile d’aller vers eux et eux de venir vers nous ». Ce sentiment est accentué dans le Xe puisqu’il y a de nombreuses personnes de passage du fait des gares et des nombreux restaurants et commerces, mais il traverse toute la société. Les nuisances sonores et la saleté de la ville sont également évoquées.
Il y a également de très nombreux projets urbains dans le 10e qui génèrent des travaux permanents qui semblent ne jamais finir. Il faudrait peut-être faire un rééquilibrage est-ouest sur les projets urbains.
Des problèmes de pauvreté et de mal-logement
Cette dureté de la ville tient également à la pauvreté qui est devenue un vrai sujet avec l’augmentation des prix du logement et du coût de la vie en général. Le sujet du mal logement et du sans-abrisme alarme ainsi particulièrement, en particulier, dans le contexte des préparatifs des jeux olympiques où on assiste à un nettoyage social, exacerbant les défis pour les sans-papiers qui subissent également une xénophobie croissante.
Paris est perçue comme une ville très inégalitaire. Les difficultés d'accès à un logement abordable sont un défi majeur, en particulier pour les jeunes qui restent chez leurs parents de plus en plus longtemps faute de pouvoir payer un loyer. Sylvie a noté que, malgré des améliorations dans l'habitat, l'accès au logement reste difficile pour les plus vulnérables. À la Grange aux Belles, la première problématique que font remonter les écrivains publics, c’est le logement. Des participants ont partagé des expériences difficiles de vie sans appartement, illustrant les défis quotidiens de survie. Le prix des loyers a des conséquences en cascade : les gens sont bloqués dans leurs logements d’étudiants même quand ils progressent dans leur carrière et ont des enfants. Non seulement cela dégrade leur situation mais cela empêche les studios de se libérer pour les étudiants.Â
Face à cette situation, plusieurs solutions ont été évoquées dans les différentes tables. Il y a d’abord des réponses à trouver même au sein des immeubles ; Le confinement a pu accélérer ces réseaux ultra locaux de solidarité qu’il faut renforcer. Il y a ensuite des solutions plus structurelles comme l’obligation de mise sur le marché des appartements du parc privé que certains propriétaires utilisent comme placement financier, la construction de plus de logements sociaux, l’usage de bâtiments désaffectés de la mairie.
Les tensions lié au manque de civisme et à la cohabitation vélo-piétons
Les incivilités sont une préoccupation majeure pour les résidents du 10e. De nombreux témoignages ont relevé les défis de cohabitation entre piétons, vélos, et motos, avec des cyclistes et motards souvent pointés du doigt pour leur manque de respect des règles. Le développement des pistes cyclables est presque toujours vu comme une bonne chose (même par ceux qui voudraient que la parole des automobilistes soient davantage entendus) mais toutes et tous conviennent qu’elles entraînent pour le moment des tensions : « Que les piétons remercient les vélos qui s’arrêtent au feu rouge n’est pas normal ». Les vélos sont vus comme la principale forme d’incivilité.Â
Les problèmes posés par les déjections canines et le atteintes à l’hygiène dans les espaces publics ont aussi été soulignés, révélant un manque de respect pour l'environnement commun. Des suggestions ont été avancées pour intégrer l'éducation civique dans l'apprentissage de la conduite à deux roues dès le jeune âge comme cela se fait dans les pays nordiques ou des stages de sensibilisation pour les cyclistes en infraction sur le modèle de ce qui se fait pour les automobilistes.Â
De manière générale, l'éducation a été mise en avant comme la meilleure solution pour renforcer le civisme et pour sensibiliser les plus jeunes à l’importance des activités dédiées à l’intérêt général. Les activités périscolaires peuvent être le bon espace pour cela.Â
Face aux incivilités une ligne de partage revient souvent : Sont-elles le résultat d’un manque de moyens et d’infrastructures (par exemple un manque de toilettes publiques et de parcs canins -il n’y en a qu’un seul sur tout le canal Saint-Martin) ou, faut-il plutôt davantage responsabiliser ceux qui se rendent coupables de ces incivilités ?Â
Le problème des incivilités ressort davantage dans le 10e que dans d’autres arrondissements, peut-être parce que c’est un arrondissement particulièrement dense et qui attire une population nombreuse extérieure à l’arrondissement. Cela fait dire à certains que « Les gens qui font les incivilités n’habitent pas le quartier » et que celles-ci résultat du fait qu’il y a trop de restaurants, trop de bars et donc trop de monde.
Retrouvez ci-dessous notre podcast avec les mots de conclusion des participants de la rencontre :
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